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HISTOIRE DE L’ASTRONOMIE

ENTRE LE MYTHE ET LA SCIENCE

 

C - VERS L’ASTRONOMIE SCIENTIFIQUE : LE GEOCENTRISME DES GRECS ET DE LEURS HERITIERS (Xe siècle avant J-C-XVe siècle après J-C)

I - LES PREMIERS GRECS : DU MYTHE A LA SCIENCE (1000-500 avant J-C) :

Les Grecs sont un peuple vivant presque continuellement en état de guerre ; ils ont tendance à être élitistes et barbares. C’est dans ce contexte sanglant que s’exprime leur aspiration au beau, à la pureté esthétique, à l’idéalisme, au règne de la raison. C’est sans doute pourquoi leur mythologie présente à la fois une naissance de l’univers pleine de guerres et de violence et un effort divin - celui de Zeus - pour instaurer un ordre rationnel dans ce même univers.

Même si la mythologie est encore très présente à l’époque, les philosophes présocratiques sont les premiers à critiquer le polythéisme, à remettre en question les affirmations des mythes. En même temps, chacun d’eux présente une vision personnelle de l’univers, fondée sur sa propre réflexion.

 1 - Origine et composition de l’univers 

Hésiode rapporte qu’au commencement est Chaos, personnification du Vide absolu et primordial ; puis apparaîtra Gaïa (ou Gaea), la Déesse-mère, le Principe universel d’où naissent toutes choses et enfin Eros, la force du désir qui porte les êtres à s’unir les uns aux autres. Trois forces sont donc à l’oeuvre.

Chaos engendre tout seul un couple : le dieu Erébos (c’est-à-dire les Ténèbres de l’enfer) et la déesse Nyx, la Nuit, dont les enfants seront : Ether (dieu de l’Atmosphère) et Héméra (déesse du Jour). La Nuit engendre (toute seule aussi) une multitude d’êtres étranges : le Destin, le Sommeil, les Songes, la Gaieté, les Plaintes, les Hespérides, les Parques, Eris, la discorde, etc.

De son côté, Gaïa enfante Ouranos, le Ciel ; puis elle crée les hautes montagnes et la Mer. L’univers est constitué. De son côté, Gaïa s’unit à la Mer et engendre elle aussi des divinités. D’autres divinités ont des enfants. Le cortège des naissances est très impressionnant !

Il reste à peupler l’univers. Gaïa s’unit à son fils Ouranos ; ils engendrent les douze Titans, parmi lesquels le fleuve Oceanos, Cronos et Rhéa, la Mère des dieux. Ils engendrent aussi des Cyclopes et des monstres. Gaïa crée également la race des hommes.

Mais Ouranos déteste ses enfants et les enferme dans les profondeurs de la Terre. Alors, Gaïa demande à ses enfants survivants de tuer Ouranos ; c’est Cronos qui s’en charge. Le sang de la blessure d’Ouranos féconde le sol et donne naissance aux Furies, aux Géants monstrueux et à des nymphes. Quant aux débris d’Ouranos flottant à la surface de la mer, ils produisent une écume blanche d’où naîtra la déesse Aphrodite.

Cronos monte alors sur le trône des dieux et engendre à son tour d’autres dieux. Mais l’histoire se répète : Cronos, qui craint d’être supprimé par l’un de ses enfants, dévore ceux-ci. Sa femme et soeur Rhéa parvient à sauver son fils Zeus, puis quelques-uns de ses frères et soeurs.

Zeus, à son tour, décide de combattre Cronos. Il y parvient, monte sur le trône, épouse sa soeur Héra mais il n’y aura plus d’infanticides. En revanche, il y aura de nombreuses guerres sanglantes contre les enfants de Gaïa, les Titans, Géants et monstres diversMais c’est un dieu original, plus humain que les dieux habituels : il symbolise en quelque sorte l’intelligence, la raison humaine, ainsi que le dynamisme fertilisant de l’atmosphère, face au gigantisme chaotique, impersonnel et impassible de la Nature. De plus, contrairement aux héros d’autres mythologies, Zeus ne crée pas la race humaine à partir de la chair de monstres vaincus, mais simplement en s’adonnant aux plaisirs de l’amour, avec toutes les femmes possibles et imaginables.

Ce mythe primitif et populaire connaîtra une variante beaucoup plus philosophique et métaphysique ; les Grecs se réclament alors des récits d’Orphée, poète légendaire : Au commencement est Chronos, le Temps. Il engendre le Chaos (l’Infini) et l’Ether (le fini). Le Chaos est enveloppé de la Nuit. C’est sous l’action de l’Ether que s’organise lentement la matière cosmique. Celle-ci prend finalement la forme d’un oeuf, dont la Nuit constitue la coquille. A l’intérieur de cet oeuf gigantesque, dont la partie supérieure forme le ciel et la partie inférieure, la terre, naît le premier être, Phanès, la Lumière. S’unissant à la Nuit, il crée le Ciel et la Terre. Il engendre également Zeus.

 Le mythe primitif , lui, installe les dieux sur une montagne cosmique : le mont Olympe. Zeus, dieu du Ciel et de la Foudre, est le roi des dieux. Son épouse Héra est à l’origine également déesse du Ciel et vierge céleste ; elle devient ensuite déesse du mariage et de la maternité. Leurs querelles fréquentes peuvent traduire les bruyants phénomènes atmosphériques (orages, tempêtes...)

Parmi les divinités proprement cosmiques, on relève Poséidon, frère de Zeus, et à l’origine dieu du Ciel, du Tonnerre, de l’Humidité et de la Fécondité, puis de l’Océan ; Héphaïstos, fils de Zeus, est le dieu du Feu terrestre. Il existe aussi de nombreuses divinités des vents (Eole), des eaux, de la terre (outre Gaïa et Rhéa, il y a Cybèle et Démèter)...

Mentionnons aussi le dieu Dionysos, fils de Zeus et essentiel dans le mythe orphique : dieu du vin, de la végétation et des plaisirs ; dans le mythe orphique, il est tué et ressuscité : il devient ainsi le symbole de la vie universelle.

Perséphone, elle, est la fille de Démèter : elle symbolise le printemps qui rejoint, durant les autres saisons, son époux Hadès, dieu des Enfers. Enfin, Hermès, autre fils de Zeus, est bien sûr le messager des dieux, dieu lui-même des voyageurs, commerçants, voleurs... mais aussi le dieu de la connaissance et de l’astronomie !

 Les activités des divinités célestes traduisent les différents phénomènes que les Grecs peuvent observer dans le ciel :

Hélios est le dieu du Soleil : chaque matin, il sort à l’orient d’un marais formé par le fleuve Océan. A son char d’or, ouvrage d’Héphaïstos le forgeron, les Heures attellent leurs chevaux ailés et d’un blanc éclatant, qui jettent des flammes par leurs naseaux. Le dieu gravit alors la voûte du ciel. Puis il descend vers l’occident et arrive à la fin de la journée au pays des Hespérides - les nuages dorés du couchant, demeurant dans un jardin merveilleux et veillant sur ses pommes d’or, à moins qu’il ne s’agisse de troupeaux de moutons, évoquant les nuages ! -, où il trouve une barque, elle aussi façonnée par Héphaïstos, dans laquelle l’attendent sa mère, sa femme et ses enfants. Il navigue toute la nuit et se retrouve le matin à son point de départ. Sa soeur Séléné est la déesse de la Lune.

Mais l’un des fils de Zeus, Apollon, est aussi celui de la poésie et de la Lumière Solaire, tandis que sa soeur Artémis est à la fois déesse de la chasse et de la Lumière Lunaire. Hécate, déesse infernale, est également liée à la Lune.

Eos, autre soeur d’Hélios, est l’Aurore aux doigts de rose et aux paupières de neige. Elle chevauche parfois le cheval ailé Pégase.

Les constellations ont elles aussi leur importance dans la mythologie grecque : Orion est un géant fameux pour sa beauté. Fils de la Terre ou de Poséidon, il naît d’une peau de génisse ; très vite il se passionne pour la chasse et accompagne volontiers la déesse Artémis. Celle-ci le tuera ; Orion est alors transporté au ciel où, couvert d’une armure d’or, il brille durant les nuits d’hiver. La constellation des Pléiades est elle aussi liée à de nombreux récits. Ces sept jeunes filles, dont le père est le géant Atlas, sont finalement changées en astres et annoncent le retour de la belle saison. Quant à la Grande Ourse, elle est à l’origine une nymphe nommée Callisto, aimée de Zeus, enceinte de lui puis transformée en ourse et projetée au ciel (punition d’Héra jalouse ou protection de Zeus contre cette jalousie ?).

La Voie Lactée, elle, est liée à la légende du héros, mi-dieu, mi-homme, Héraklès. Pour devenir immortel, il doit têter le sein de Héra, la déesse acariâtre. Il lui faut donc ruser : c’est Hermès qui dépose l’enfant sur le sein de la déesse endormie. Sitôt l’œil ouvert, Héra repousse Héraklès, mais il est trop tard : le lait qui coule de son sein fait une traînée dans le ciel : ainsi est née la Voie Lactée.

 2 - Les différentes cosmogonies

 a - VIIIème siècle avant J-C :

              Hésiode voit la Terre comme un disque situé à égale distance entre la voûte du Ciel et la région des Enfers. L’étendue de l’univers a été mesurée, selon le mythe, par l’enclume de Vulcain, laquelle aurait mis neuf jours et neufs nuits à tomber du Ciel sur la Terre et autant pour descendre aux Enfers.

 b - VIème siècle avant J-C :

              Le grand mathématicien Thalès pense que la Terre est un disque flottant sur l’eau et le Ciel une voûte qui limite le monde. Il devient célèbre en annonçant une éclipse de Soleil qui aura lieu à la date prévue. Pour lui, il n’existe qu’un seul élément : l’eau, dont tous les autres sont issus.

 A la même époque, le philosophe Anaximandre prétend que la Terre est cylindrique. Elle est isolée dans l’espace, le Ciel étant une sphère complète au centre de laquelle se tient, sans support, le cylindre Terre. A ses yeux, la seule substance primordiale est la matière infinie et éternelle, capable de toujours produire des êtres nouveaux.

 L’autre grand mathématicien, Pythagore (dont on ne sait d’ailleurs pratiquement rien et qui n’a rien écrit), fonde une école philosophico-religieuse dont les membres se consacrent entièrement à la recherche et à la connaissance du monde. Pythagore croit à la métempsycose (une même âme peut animer, au cours de vies différentes, plusieurs corps). Pour les pythagoriciens, l’essence profonde des choses est le nombre. Ils pensent donc que la réalité tout entière peut s’expliquer par les nombres. Ceux-ci sont la répétition et la variation d’éléments fondamentaux qui, en se disposant géométriquement sous des formes diverses, donnent naissance à toutes les choses existantes. C’est en étudiant les figures géométriques et en recherchant les rapports numériques entre les différentes parties que Pythagore en arrive à la formulation du célèbre théorème qui porte son nom : « Dans un triangle rectangle, le carré de l’hypoténuse est égal à la somme des carrés des deux autres côtés. »

L’univers apparaît donc comme un ensemble ordonné (« cosmos », en grec, signifie « ordre ») reposant essentiellement sur le nombre 10, nombre parfait : il y aura 10 corps célestes sphériques, la sphère étant considérée comme le corps parfait du fait de la plénitude absolue de son volume. Les corps qui évoluent dans le ciel doivent être au nombre de 10 : les neuf corps visibles (la Terre, la Lune, le Soleil, les 5 planètes et la voûte des étoiles fixes) + un corps invisible : l’anti-Terre, sans doute imaginé pour expliquer les éclipses, pour l’opposer à la Terre, ou simplement pour arriver au nombre 10. De plus, tout ce qui se déplace dans le ciel est non seulement régi par la loi éternelle et rigoureuse des nombres mais doit encore avoir un mouvement circulaire et régulier. Ainsi, les cinq planètes ne sont plus des « corps errants » (selon l’étymologie du mot) qui vont librement leur chemin mais décrivent nécessairement un cercle, comme tous les corps célestes.

L’univers est partagé en deux régions : le Ciel, où les corps, formés d’éther (le 5ème élément, aussi appelé la quintessence), ne peuvent se dégrader ni disparaître ; la Terre, où tout est sujet au changement, à la corruption, à la naissance et à la mort.

 Enfin, le philosophe Héraclite, sans doute inspiré par les mythes égyptiens, pense que la Guerre est le Père de toutes les choses et de l’union des contraires. Pour lui, le feu est l’élément primordial et l’échangeur de tous les mouvements qui se compensent mutuellement. Pour lui, « tout s’écoule » en permanence ; rien, dans l’univers, n’a de stabilité. (Des penseurs et poètes modernes comme Hegel ou René Char se sont beaucoup inspirés de sa pensée.) « Nous ne nous baignons pas deux fois dans le même fleuve », a-t-il déclaré en une formule devenue célèbre.  

 

            A cette époque, on détient un certain nombre de connaissances astronomiques : on sait par exemple que la lune est éclairée par le soleil et que c’est l’interposition de la lune ou de la Terre qui provoque les éclipses…

 Le philosophe Parménide, disciple de Pythagore, formule pour la première fois l’hypothèse selon laquelle la Terre serait une sphère. Il défend la thèse contraire à celle d’Héraclite : pour lui, le devenir n’existe pas ; seul existe l’Etre immuable.

 Le philosophe Anaxagore, lui, a une intuition géniale : refusant l’idée que les astres sont des dieux, il pense que les planètes et la Lune sont comme des projectiles - des pierres - lancées dans l’espace. Il parvient à expliquer correctement les éclipses de Lune par le passage de cet astre dans l’ombre de la Terre.  Sous l’influence de Philolaos se propage l’idée que non seulement la Terre mais encore tous les astres sont sphériques. Autre idée géniale : rien ne se perd, rien ne se crée, mais tout est produit par l’Intelligence supérieure qui ordonne les substances composant l’univers.

 Enfin, le philosophe Empédocle est le premier à dégager les quatre éléments - l’eau, la terre, l’air, le feu - comme étant les racines de l’univers. Ces quatre éléments sont mis en mouvement par les deux forces contraires qui gouvernent l’univers : la Haine et l’Amour.

II - LES GRANDS THEORICIENS GRECS : LE GOUT DE LA PHILOSOPHIE ET DES MATHEMATIQUES (IVème siècle avant J-C-IIe siècle après J-C) 

A partir du IVème siècle avant J-C, la grande originalité des Grecs est la suivante : loin de se contenter des résultats obtenus par l’observation de la réalité, ils ont voulu rechercher les causes profondes de tous les phénomènes. En outre, ils soutenaient que, derrière tout ce qui existe et que nous observons, il y a quelque chose qui en constitue l’existence, c’est-à-dire sa nature intime, sa réalité profonde.

Les Grecs de cette époque sont les précurseurs de la science moderne, comme le montre l’exemple du génial mathématicien Archimède, qui vécut au IIIème siècle avant J-C. 

a - IVème siècle avant J-C :  

Le philosophe Démocrite provoque un tournant dans la pensée grecque de l’univers : il fonde ce qu’on appelle l’atomisme. C’est la première tentative scientifique d’expliquer l’univers. Pour lui, celui-ci est non-créé. Seule la nécessité est responsable de son organisation et de son devenir. Cette nécessité est d’ailleurs inexplicable et il ne sert à rien de réfléchir sur sa nature. En revanche, Démocrite est le premier Grec à s’intéresser à la nature en tant que telle : il la décrit comme étant simplement composée d’atomes, c’est-à-dire de particules élémentaires invisibles, insécables et éternelles, qui se meuvent dans le vide et s’agencent de multiples façons : en se réunissant, ils produisent la construction et la vie, en se séparant, ils provoquent la destruction et la mort. 

 De son côté, le grand philosophe Platon insiste sur l’importance primordiale des mathématiques. Il lit les ouvrages des astronomes de son époque et sait que la Terre est une sphère.

Il expose sa vision du monde dans le Timée : il imagine un espace infini dans lequel est plongé un univers limité, clos et sphérique. La Terre trône au centre du monde. Platon insiste sur la régularité de la structure du cosmos : tout l’univers est décrit à partir des cinq solides géométriques réguliers. Platon associe chacun de ces cinq corps les cinq éléments dont on pensait à l’époque qu’ils composaient l’univers : l’eau, l’air, la terre, le feu et l’éther.

Platon présente aussi son propre mythe de la création de l’univers ; ce n’est là qu’une fiction destinée à nous faire comprendre sa conception de l’univers : à l’origine, il y a d’une part un monde pur, gouverné par les Idées et immuable ; et, d’autre part, une sorte de chaos, impur et changeant. Le Dieu ordonne au démiurge d’organiser ce chaos en prenant modèle sur le monde pur des Idées. De cette organisation est né notre monde sensible, c’est-à-dire tout ce que, dans l’univers, nous pouvons voir, entendre, toucher, goûter et sentir. Mais le démiurge n’est pas capable de vraiment copier le monde des Idées. C’est pourquoi les hommes, dans l’univers, sont comme prisonniers d’une caverne : ils n’aperçoivent que des ombres. Seuls qui acceptent de pratiquer la philosophie peuvent commencer à sortir de cette caverne obscure et peu à peu à accéder au monde parfait des Idées.

L’autre géant de la philosophie, Aristote, dans son traité Du ciel, prolonge la vision de Platon mais, fait important, il abandonne la théorie des Idées pour s’intéresser totalement au monde que nos sens peuvent percevoir. Il met en avant la notion d’un monde ordonné, géocentrique et hiérarchisé : l’univers dans son ensemble est fini (comme tout ce qui a un centre) et sphérique. La matière est éternelle. Au centre de l’univers se tient la Terre, immobile. Selon Aristote, tout l’univers se déplace en direction d’un Dieu (c’est-à-dire qu’il recherche la perfection) qu’il appelle Moteur immobile : celui-ci, en attirant l’univers à lui, le fait se mouvoir tout en restant lui-même immobile. Cette conception du monde sera reprise ensuite et développé au Moyen-Age. Cependant, il semble que ce moteur immobile, cet être suprême, une fois qu’il a mis l’univers en mouvement, n’intervienne plus dans son déroulement. En tout cas, le philosophe ne se préoccupe pas de son étude. On peut donc dire qu’Aristote est le premier grand philosophe à séparer la théologie (étude de Dieu, de l’Etre suprême) de la connaissance - celle-ci devenant alors vraiment scientifique.

Les corps célestes appartiennent à des sphères transparentes qui s’emboîtent parfaitement, sans intervalle entre elles et dans un ordre défini. L’idée des 27 sphères homocentriques, dont la Terre, vient de l’astronome et mathématicien Eudoxe de Cnide. Chaque sphère tourne autour de l’axe du monde et entraîne celle qui lui est inférieure. Toujours à la suite de Platon, Aristote distingue deux parties de l’univers : le monde supralunaire, où tout se déroule avec simplicité et sans efforts et le monde sublunaire, auquel le philosophe consacre son étude. Ici, seuls les mouvements verticaux semblent être naturels ; en effet, les corps lourds tombent spontanément vers la Terre, leur lieu naturel, tandis que les corps légers tendent à s’élever dans l’air. Tout autre mouvement est contraire à la nature, est l’effet d’une cause qu’il faut rechercher : chaque effet doit avoir sa cause et chaque cause son effet.

b - IIIème siècle avant J-C :

 Le mathématicien et astronome Aristarque est le véritable précurseur de Copernic puisqu’il met le Soleil au centre du système planétaire, affirmant que la Terre tourne sur elle-même en 24 heures et autour du Soleil en un an. De plus, il se montre capable de calculer approximativement la distance entre la Terre, le Soleil et la Lune. Au cours de ce siècle, on assiste en Grèce à un développement remarquable des études scientifiques, surtout des mathématiques et de l’astronomie.

c - IIème siècle avant J-C :

Un grand astronome nommé Hipparque découvre le déplacement conique et très lent (26000 ans) des équinoxes d’est en ouest mais il ignore évidemment qu’il est provoqué par la rotation de l’axe de la Terre. Il réussit à mesurer ce déplacement, ce qui l’amène à distinguer l’année sidérale (intervalle de temps entre deux passages du Soleil devant une même étoile) et l’année tropique (intervalle de temps entre deux passages du Soleil par l’équinoxe de printemps). Par ailleurs il observe et classe environ 850 étoiles selon leur éclat ; il détermine aussi leur position. Enfin, ses théories sur le Soleil et la Lune seront reprises, quatre siècles plus tard, par Ptolémée.

d - IIème siècle après J-C :  

L’astronome, géographe et cartographe Ptolémée, héritier de toute la tradition philosophique et scientifique grecque, poursuit et complète les travaux de ses prédécesseurs. Son oeuvre est considérable. Il expose dans l’Almageste son système géocentrique du monde, qui fera autorité jusqu’à la Renaissance ! La Terre est immobile au centre de l’univers ; autour d’elle se déploient les sphères célestes successives sur lesquelles se meuvent la Lune, le Soleil, les planètes et les étoiles ; avec la huitième sphère, à laquelle sont accrochées les étoiles, s’achève l’univers.

        Pour expliquer l’irrégularité du mouvement des planètes errantes, Ptolémée a recours à des subtilités mathématiques, qui lui permettent de rendre compte de tous les phénomènes connus à l’époque.

       Il s’intéresse notamment au problème des éclipses et améliore les théories d’Hipparque : il calcule les conditions d’existence de l’éclipse, il détermine si l’éclipse sera partielle ou totale et prévoit sa durée. Cette théorie des éclipses ne subira pratiquement aucune modification jusqu’au XVIIème siècle.

        Grâce à des tables et des exemples, il peut calculer la position des astres et des planètes... Il établit le premier catalogue complet d’étoiles que nous ayons conservé : 1022 étoiles y sont classées par constellations, avec leurs coordonnées et leur éclat.

       Il rédige également une grande description physique du monde, le plus grand traité d’astrologie de l’Antiquité, un traité d’optique, etc.

       Il a aussi construit des instruments d’astronomie (un astrolabe, notamment, servant à connaître la position des astres et à s’orienter). Après lui, l’astronomie va connaître, en tout cas dans l’occident latin, un déclin progressif - notamment à cause des multiples bouleversements (sociaux, militaires, économiques et religieux) qui suivront. C’est l’Orient qui va prendre la relève.

III - LES ARABES : LES PROGRES DE L’OBSERVATION ASTRONOMIQUE (VIIIème siècle-XVème siècle après J-C) 

Les Arabes jouent un rôle essentiel dans l’histoire de l’astronomie : ce sont eux qui font le lien entre Ptolémée et le monde occidental naissant. Ils étudient l’Almageste de Ptolémée de façon approfondie, en vérifient et en corrigent les paramètres. Leur immense empire et leur culture raffinée, influencée par les astronomes indiens, connaisseurs des Grecs, va permettre aux chrétiens européens de prendre connaissance de l’héritage grec. Ils possèdent deux calendriers : le calendrier liturgique, lunaire et très ancien, emprunté à l’Extrême-Orient ; le calendrier solaire qui rythmait les activités profanes (levée des impôts ou récoltes).

De plus, l’astronomie est pour les Arabes une science fondamentale parce qu’à travers elle se manifeste l’organisation de l’univers et, par conséquent, le pouvoir de Dieu.

En outre, il est important pour eux de déterminer le début du Ramadan, mois pendant lequel les musulmans doivent jeûner entre le lever et le coucher du soleil. L’étude des astres permet aussi de fixer précisément le moment des prières que tout fidèle doit faire à la mosquée, toujours orientée vers la Mecque.

Enfin, influencés par les Grecs, les Arabes se passionnent pour les horoscopes et l’astrologie. 

Les plus grands astronomes arabes sont : Thabit ibn. Qurra (IXème siècle), Ibn Yunus, Azarquiel (Xème siècle), Al-Biruni et Ibn al-Haytam, alias Alhazen (X-XIème siècle).

Les progrès qu’ils accomplissent sont les suivants :

- De meilleures observations et la réalisation de tables astronomiques permettant de prévoir les mouvements du Soleil, de la Lune et des planètes. C’est dans ce but qu’ils ont créé des observatoires où l’activité astronomique est intense. Ils découvrent notamment l’existence d’éclipses de soleil annulaires. Leur influence s’exercera jusqu’au XVème siècle.  

- Un réel intérêt pour les astrolabes et pour d’autres instruments astronomiques. Ils sont les premiers à mentionner, par exemple, l’utilisation de tubes d’observation, dépourvus de lentilles, afin d’éliminer la lumière parasite.   

- Des progrès importants dans le calcul trigonométrique et la géométrie des sphères, jusqu'à être amenés à remettre en question les théories de Ptolémée, sans toutefois pouvoir proposer de théorie plus satisfaisante. 

- Des études importantes sur la forme de la Terre et la mesure de ses dimensions.

 

IV - LES CHRETIENS DU MOYEN AGE : DIEU ET LES ANGES, MAITRES DE L’UNIVERS (XII-XVème siècles) 

L’Europe chrétienne connaît, à partir du XIIème siècle, un renouveau astronomique : d’abord par une intense activité de traduction, notamment en Espagne, où les musulmans, les juifs et les chrétiens échangent leurs connaissances : on y découvre la culture grecque ; on y étudie les traités d’Aristote, de Ptolémée et des auteurs arabes. De leur côté, les hommes des Croisades contribuent à cet échange culturel. Enfin, la naissance des universités est décisive pour l’épanouissement de cette nouvelle culture. 

Première nouveauté : de nombreux ouvrages d’astronomie vont alors se répandre en Europe au XIIIème siècle. Au XIVème siècle, avec l’invention de l’imprimerie, est imprimé le premier traité d’astronomie : Le Traité de la sphère, de Jean de Sacrobosco (écrit au 13e siècle) et il sera encore étudié dans les universités au XVIIème siècle ! Il ne s’agit pourtant que d’un ouvrage rudimentaire...

Seconde innovation : le développement des tables astronomiques, rédigées en langue arabe et traduites en latin - celles de Tolède, notamment, appelées Tables Alphonsines, qui connaîtront une très large diffusion et auront une longue descendance  : de nouvelles tables seront ainsi créées, toutes adaptées au calendrier chrétien. A partir du XIVème siècle, se répandent dans les milieux astronomiques parisiens des tables beaucoup plus ambitieuses, établies indépendamment d’un calendrier particulier. Leur succès est tel qu’à partir du XIVème siècle, celles-ci et leurs adaptations éclipsent toutes les autres.

Troisième innovation : le perfectionnement des instruments astronomiques comme l’astrolabe et les quadrants qui permettaient de mesurer les angles. 

En outre, la chute définitive de l’empire byzantin, en 1453 - date de la fin du Moyen Age en occident - amène en Italie d’éminents érudits, possédant de précieux ouvrages d’astronomie, dont l’Almageste. 

Tout cela conduit deux savants du XVème siècle - Georg Peurbach et son élève Regiomontanus - à composer et publier les Théories nouvelles : on y découvre que l’orbite de Mercure ressemble à un ovale et on pense que les astres sont entraînés par un ensemble d’orbes d’épaisseur variable et dont chacun remplit les sphères célestes (dont l’existence n’est pas encore remise en question).

 Mais ces orbes continuent à poser problème : quels sont-ils exactement ? On est contraint d’ajouter une neuvième sphère aux huit de la tradition grecque pour expliquer que le mouvement des constellations ne coïncide pas avec celui de la sphère des étoiles fixes... Certains ajoutent même au-delà de la voûte céleste un autre ciel immobile appelé l’Empyrée : là est localisé le paradis de l’au-delà, où résident les anges et les saints. On pense que le cosmos est tout entier animé d’un mouvement perpétuel, qui doit avoir une cause : les esprits angéliques font tourner les sphères ; au sommet du ciel réside Dieu lui-même qui, sans cesse, soutient sa Création, au centre de laquelle se trouve la Terre.

Enfin, on s’appliquera à inventer, à la fin du XVIème siècle, un meilleur calendrier que le précédent (établi par Jules César) : il sera appelé calendrier grégorien afin de se mettre en rapport avec le mouvement réel du soleil et de pouvoir célébrer, par exemple, la fête de Pâques au bon moment.

 

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