MAITRE MUSULMAN
Poète
et philosophe perse, Hallaj est sans doute l'un des plus célèbres mystiques de
tous les temps pour le monde islamique, bien qu'il soit presque totalement
inconnu en Occident. Né à Tur (Iran) en 857, il reçoit une éducation
coranique en langue arabe, ses parents s'étant installés en Irak. Dès
l'adolescence, il est extrêmement pieux et connaît des épisodes extatiques
qui provoquent l'admiration et la crainte. À vingt ans, il entre dans une
communauté soufie à Bassora et devient moine, consacrant - bien que cela ne
l'empêche pas de se marier et d'avoir des enfants sa vie à Dieu, à la méditation
et à la prière. Poèmes et oraisons ponctuent son itinéraire spirituel.
Toujours
vêtu de noir, montrant l'exemple du dépouillement, de l'ascèse et de la
rigueur morale, il entreprend son premier pèlerinage à La Mecque. Sa présence
près de la Kaaba va exacerber encore son mysticisme et son intransigeance.
Pendant une année entière, il restera, dit-on, assis sur le parvis du lieu
saint, pratiquant le jeûne et la prière, sorte de reproche vivant - ou de modèle
- pour les croyants dont il estime la dévotion superficielle ou insuffisante.
Il
prêche, rassemble des fidèles au cours de périples qui vont le mener jusqu'au
Khorasan, en Inde et au Turkestan.
Mais
son exaltation, les sacrifices qu'il s'inflige, cette folie de Dieu qui l'habite
le signalent à la vindicte des autorités religieuses. Dès son retour à
Baghdad, les chiites l'accusent de sorcellerie, les soufis le rejettent, lui qui
a osé quitter leur confrérie.
II
est emprisonné et condamné à mort. Il réchappe une première fois à la
sentence grâce à des adeptes influents, mais quelques mois plus tard, jugé
fou et hérétique, mais sans doute trop populaire, il est exécuté par décapitation
en 922, à Baghdad.
De
savoir aimer
«
Par orgueil je refusai le bonheur de l'amour, et je subis le châtiment de
l'orgueil. J'ai un Bien-Aimé que je visite dans les solitudes. Présent et
absent aux regards, tu ne me vois pas l'écouter avec l'ouïe. Pour comprendre
les mots qu'il dit, mots sans forme ni prononciation et qui ne ressemblent pas
à la mélodie des voix. C'est comme si en m'adressant à lui par la pensée, je
m'adressais à moi-même. Présent et absent, proche et lointain. Les figures
des qualificatifs ne peuvent le contenir : Il est plus près que la conscience
pour l'imagination, et plus caché que les pensées évidentes. Entre toi et
moi, il y a un " je suis" qui me tourmente. Ah ! Ôte par ton "je
suis" mon "je suis" hors d'entre nous deux. »
O
toi qui poses des questions sur notre aventure, si tu nous avais vus, tu ne nous
différencierais plus, je suis devenu celui que j'aime, et celui que j'aime est
devenu moi. Nous sommes deux esprits, fondus en un seul corps pour nous, depuis
que nous sommes en confiance mutuelle, les gens mettent notre légende en
proverbes. Lorsque tu m'as aperçu, tu l'as aperçu, et lorsque tu l'as aperçu,
tu nous as aperçus. Son esprit est mon esprit, et mon esprit son esprit. Nous
sommes deux esprits vivant en un seul corps. »
Extraits
de Le livre des sagesses d’Orient par Gilbert Sinoué, Ed. Le Club,
2000.
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