MAITRE BOUDDHISTE
Né
en 1927 en Corée du Nord de parents chrétiens protestants, il atteint l'éveil
à vingt-deux ans. Il est militaire durant cinq ans puis réformateur de l'ordre
bouddhiste Chogye. Il enseigne alors neuf ans au japon. En 1972, i1 arrive aux
États-Unis sans argent ni connaissance de la langue. Il dirige maintenant un réseau
mondial de centres zen.
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Le cercle Zen |
Un
soir, au Centre zen de Providence, Seung Sahn Soen-sa prononça le discours
suivant
«
Qu'est-ce que le Zen ? Le Zen, c'est se comprendre soi-même. Que suis-je?
«
J'explique le Zen au moyen d'un cercle. Il y a cinq points marqués sur ce
cercle : zéro degré, quatre-vingt-dix degrés, cent quatre-vingts degrés,
deux cent soixante-dix degrés, et trois cent soixante degrés. 360 degrés sont
exactement le même point que 0 degré.
«Nous
commençons avec l'intervalle compris entre 0 et 90 degrés. C'est la zone de la
pensée et de l'attachement. La pensée est désir, le désir est souffrance.
Toutes choses sont divisées en opposés : bon et mauvais, beau et laid, à toi
et à moi. J'aime ceci, je n'aime pas cela. J'essaie d'être heureux, et d'éviter
la souffrance. Donc, la vie ici est souffrance, et la souffrance est la vie.
«
Au-delà de 90 degrés se trouve la zone de la conscience, ou "Moi-Karma".
Avant 90 degrés, on est attaché au nom et à la forme. Ici, il y a un
attachement à la pensée. Avant de naître tu étais zéro, maintenant tu es
un, dans le futur tu mourras et de nouveau deviendras zéro. Donc, zéro égale
un, un égale zéro. Toutes choses ici sont identiques, car elles sont faites de
la même substance. Elles ont toutes un nom et une forme, mais leurs noms et
leurs formes viennent de la vacuité et retourneront à la vacuité. On reste
encore dans le domaine de la pensée.
«
À 180 degrés, il n'y a pas de pensée du tout. C'est l'expérience de la vraie
vacuité. Avant la pensée, il n'y a ni mots ni discours. Il n'y a donc ni
montagne, ni rivière, ni Dieu, ni Bouddha, rien du tout. Il y a seulement... »
À ce moment, Soen-sa frappe la table.
«
Ensuite, vient la zone au-dessus de 270 degrés, la zone de la magie et des
miracles. Ici, la liberté est totale, sans limite ni dans le temps ni dans
l'espace. C'est ce qu'on appelle "la pensée vivante". Je peux me
transformer en serpent. Je peux chevaucher un nuage jusqu'au Paradis de l'Ouest.
Je peux marcher sur l'eau. Si je veux la vie, j'ai la vie; si je veux la mort,
j'ai la mort. Dans cette zone, une statue peut pleurer; le sol n'est ni clair ni
foncé; l'arbre n'a pas de racines; la vallée pas d'écho.
«
Si tu restes à 180 degrés, tu deviens attaché à la vacuité. Si tu restes à
270 degrés, tu deviens attaché à la liberté.
«
À 360 degrés, toutes choses sont simplement comme elles sont, la vérité est
juste ainsi. "Juste ainsi" signifie qu'il n'y a pas d'attachement à
quoi que ce soit. Ce point est exactement le même point que zéro; nous
arrivons où nous avons commencé, où nous avons toujours été. La différence
est qu'à zéro degré il y a une pensée avec attachement, tandis que 360 degrés
correspondent à une pensée sans attachement.
«
Par exemple, si tu conduis une voiture en étant attaché à la pensée, ton
esprit sera ailleurs, et tu passeras au feu rouge. Si tu n'es pas attaché à la
pensée, ton esprit est clair tout le temps. Lorsque tu conduis, tu ne penses
pas, tu te contentes de conduire. Aussi la vérité est-elle "juste
ainsi". Le feu rouge signifie "Arrêtez-vous", le feu vert
signifie "Allez-y". C'est de l'action intuitive. Action intuitive veut
dire agir sans aucun désir ou attachement. Mon esprit est comme un miroir
clair, qui réfléchit toutes choses simplement comme elles sont. Le rouge
vient, et le miroir devient rouge; le jaune vient, et le miroir devient jaune.
C'est ainsi que vit un bodhisattva. Je n'ai aucun désir pour moi-même. Mes
actions sont destinées à tous les êtres.
« Zéro degré, c'est le "Petit Moi". 90 degrés, le "Moi-Karma". 180 degrés désignent le "Moi-Vide". 270 degrés, le "Moi-Liberté". 360 degrés correspondent au "Grand Moi". Le "Grand Moi" est temps infini et espace infini. Alors, il n'y a ni vie ni mort. Je souhaite uniquement sauver tous les êtres. Si les gens sont heureux, je suis heureux; si les gens sont tristes, je suis triste.
extraits de Cendres sur le Bouddha, de Seung Sahn, coll. Sagesses, Ed. Seuil
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La pensée |
Tout
ce que l'on peut lire, tout ce que l'on peut dire, tout cela c'est : penser.
Si vous pensez, alors tous les livres zen, tous les soutras bouddhiques, toutes les bibles ne sont que des ensembles de mots démoniaques. Mais si vous lisez avec un esprit qui a tranché toute pensée, les livres zen, les soutras, les bibles deviennent alors expression de la vérité. Et même l'aboiement du chien ou le cri du coq : à chaque instant tout est enseignement. Et les sons d'animaux enseignent mieux que les livres zen. Le Zen, c'est garder l’esprit dans l'état antérieur à la pensée.
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Le ciel est bleu...? |
Il
y a très longtemps, quelqu'un vous a dit : « Le ciel est bleu. » Et depuis
vous avez toujours transporté cette idée avec vous.
Un
chien ne dit jamais : « Le ciel est bleu ». Les chats ne disent jamais : «
Les arbres sont verts ». Un chien ne dit jamais « Je suis un chien ». Les
chats ne savent pas qu'ils sont des chats. Les êtres humains fabriquent tout et
se disputent ensuite à ce sujet. Leur vue est une vue erronée. Ils fabriquent
la couleur, la taille, la forme, le temps, l’espace, les noms et les formes.
Les êtres humains fabriquent la cause et l’effet, la vie et la mort, la venue
et le départ.
Originellement,
ces choses n'existent pas. Tout vient de notre pensée : notre pensée fabrique
chaque phénomène. Ce n'est rien de plus que l'idée de quelqu'un d'autre. Les
Américains ont une idée américaine : ils disent dog. Les Coréens ont une idée
coréenne : ils n'appellent pas ça dog mais gye . Lequel des deux est correct ?
Pour
avoir la bonne réponse, allez donc demander à un chien : « Êtes-vous un
chien ? ». Sa réponse risque d'être intéressante.
Si, pour la transformer en sagesse, nous voulons digérer toute notre compréhension des choses, nous devons retourner à notre esprit avant le moment où s'est élevée la première pensée. Cet état n'a ni nom ni forme. Certains l'appellent : esprit, nature, substance, Dieu, soi, Bouddha, âme ou conscience. Mais originellement cet état n'a pas de nom, pas de forme, parce qu'il se situe avant la pensée. Aussi, ouvrir la bouche pour nommer quoi que ce soit, est déjà une faute grave.
Extraits de 365 jours Zen, Ed. Le Courrier du Livre, 2002.
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